mardi 7 avril 2009

Oui à la Turquie

La lecture de ce billet de Koz me fait sortir ce blog apathique du sommeil du juste.

Il faut dire que Bernard Kouchner a bien préparé le terrain en annonçant aujourd'hui que, non finalement, après réflexion, il n'était plus favorable à l'entrée de la Turquie dans l'union européenne au vu des pressions abominables exercées par la Turquie contre le candidat accepté par tous les autres pays au secrétariat général de l'OTAN. Je n'ai jamais admiré Bernard Kouchner mais je crains que là, le peu de respect que je pouvais avoir pour lui ne me quitte définitivement.
Ce prétexte est risible.
Il y a des raisons tout à fait sérieuses d'être hostiles à l'entrée de la Turquie dans l'Union, mais reprocher aux Turcs de peser, y compris en mettant tout leur poids politique et diplomatique dans une bataille qui leur tient à coeur, c'est risible. A-t-on oublié qu'il y a une semaine à peine, Nicolas Sarkozy se proposait de mettre une pression identique sur les membres du G20, menaçant de quitter la table ? Soyions adultes : dans le jeu diplomatique, chacun fait valoir son jeu en fonction de ses intérêts et c'est parfaitement normal.

(Accessoirement, j'ai du mal à comprendre pourquoi on est si attaché à ce Rassmussen. C'est l'un des plus fervents partisans de George Bush, il gouverne avec un parti d'extrême-droite xénophobe... bref, il n'est pas exactement l'incarnation des valeurs européennes qu'on pouvait rêver.)

Je trouve tout à fait étonnant qu'on reproche à Barack Obama d'avoir pris publiquement position en faveur de l'adhésion de la Turquie à l'Europe. Rien de nouveau, d'ailleurs, c'est la position américaine, et de longue date. Que le chef d'Etat américain exprime publiquement ce qui est la position américaine, voilà qui n'a rien d'étonnant. Qu'il prenne position n'oblige à rien : notre allié nous indique juste ce qu'il souhaite, à nous d'en faire ce que nous voulons. Je n'ai pas l'impression que les Etats-Unis aillent au delà ou exercent une quelconque pression diplomatique sur l'Europe à ce sujet. Après tout, nous, on a bien dit aux Américains, en toute amitié, que, franchement, l'Irak, c'était pas bon pour le teint des GI. Peut être qu'eux aussi peuvent nous dire, en toute amitié, ce qu'ils pensent être le mieux pour la Turquie et/ou pour nous. En tous cas, ça ne me choque pas et je ne le vis pas comme une insupportable attaque contre la souveraineté européenne.

La position américaine est certainement le fruit de plusieurs facteurs, dont le souhait de faire plaisir à leurs amis Turcs, des alliés sûrs mais un peu irrités par ce qui se passe au Kurdistan, et le souhait aussi de conforter leur influence au sein de l'UE.... Quoi de plus normal ? Les américains prennent position en fonction de leurs intérêts nationaux, c'est le jeu diplomatique normal. On est pas obligé de faire ce qu'Obama a dit, juste parce que c'est Obama (remplacez par Sarkozy, ça marche aussi).

Personnellement, je suis favorable à l'adhésion de la Turquie dans l'Union Européenne mais ce n'est pas le sujet de ce billet : cessons de brocader avec des schémas moraux ce qui n'est que de la diplomatie et de la realpolitik ! Koz est capable de mieux !

2 commentaires:

koz a dit…

Ah non, hein, tu ne vas pas me faire le coup du "koz peut faire mieux", variante de l'honni "je l'ai connu mieux inspiré".

1. Il n'y a rien de comparable entre l'attitude de Sarko et celle d'Erdogan. Sarko faisait pression sur l'agenda du G20. Erdogan instrumentalisait la question du Secrétariat général de l'Otan au profit de questions parfaitement extérieures.

2. Il n'y a rien de comparable entre l'attitude de la France au moment de la guerre en Irak (ou tt autre cas où elle se serait prononcé sur la politique US) et ce qu'a dit Obama. Dans un cas, c'est conjoncturel, dans l'autre, c'est structurel. Obama nous dit qui doit faire partie de notre famille. Tout en n'en faisant pas partie lui-même d'ailleurs.

De surcroît, Obama est revenu trois fois sur le sujet et s'est permis de préciser qu'il le faisait "fermement". Pourquoi ce "fermement" ? D'où ?

3.Oui, Kouchner est un clown. Mais bon, à la base, il est de gauche. Tu sais ce que c'est...

4. Que pense-tu de la candidature du Maroc ?

Unknown a dit…

Très bon billet, Sôter. J'abonde. Thou shall blog more. (T'as une faute à une "soyions adulte").

@Koz :
Sur ton point 1. C'est, géopolitiquement parlant, exactement la même chose : du linkage, cette notion dont Kissinger faisait la base de sa diplomatie.

Sur ton point 2. Mouais. Si on te suit, on devrait aussi arrêter de dire aux iraniens de produire d'enrichir de l'uranium, parce qu'il ne faut pas se mêler des affaires des autres ?
Pas convaincu par ta distinction "conjoncturel / structurel", mais je ne suis pas sûr de la comprendre.