dimanche 14 septembre 2008

Laïcité positive ?

Chère Saba,

Un point sans doute où nos convictions respectives sont très éloignées : la religion. Sa place dans le débat public, ces quelques jours, à l'occasion de la venue de Benoit XVI en France, me parait sans doute surestimée. Quelques remarques en vrac :

* on a parfois l'impression, à entendre les promoteurs de la laïcité positive, que les religions, en France, seraient interdites d'expression. Il me semble pourtant que les cultes sont libres, qu'on entend régulièrement sur les ondes des responsables religieux, ou même de simples croyants. A ma connaissance, tant les catholiques que les protestants ont des radios, au moins à Paris. De nombreux livres sont publiés par des croyants chaque année. Bref, on ne peut pas dire que les Catholiques sont opprimés.

* Ces dernières années, on a vu se développer les interventions des différentes religions dans l'espace public, par exemple récemment sur l'immigration ou sur les tests ADN. Ces interventions présentaient le vif intérêt, en général, de ne pas être lié à tel ou tel parti - même si les deux exemples que je cite étaient des critiques de gouvernements de droite, on ne peut pas dire que les églises roulent pour le PS. Le lien culturel entre l'Eglise catholique et la droite n'est pas pour autant totalement rompu, mais le temps où l'Eglise s'immisçait dans les élections et la vie politique semble révolu. C'est là une différence notable par rapport à ce qui prévalait en 1904. Les Eglises prennent des positions sur quelques points, et cela ne semble pas choquer.

* En revanche, les exemples de l'islamisme ou des sectes montrent bien ce qui effraie les Français : qu'une religion intervienne tellement dans la vie d'une personne qu'elle en perd tout libre arbitre. Lorsque la religion dicte la façon dont les gens doivent s'habiller, s'aimer, vivre ensemble, il y a alors des risques sérieux pour les libertés. Lorsqu'on observe le message de l'église catholique aujourd'hui, on voit bien qu'on en est loin. Il est intéressante de noter que les prescriptions morales portées par l'Eglise sont sans doute le point qui suscite le moins d'adhésion chez ses fidèles...

* Débattre. J'entends que les religions voudraient intervenir d'avantage dans le débat public, auraient des choses à dire. Encore faut-il que les religions acceptent de se plier à ce qui est la règle du débat dans une démocratie : s'appuyer sur des arguments qui sont susceptibles de convaincre tout le monde. Lorsque une Eglise critique l'avortement au nom d'une valeur, la vie, elle est audible par tout un chacun. Lorsqu'elle indique que la vie appartient à Dieu, l'argument n'est plus audible par ceux qui ne croient pas en Dieu. Il n'est pas certain que les Religions acceptent durablement de se plier à cet exercice.

A te lire,

Sôter

Aucun commentaire: