lundi 17 novembre 2008

Comment s'engager avec le parti socialiste ? (2)

Je commence ce billet en apprenant, par Le Monde, que Bertrand Delanoë aurait finalement appelé à voter en faveur de Martine Aubry, comme premier secrétaire. Cela montre que l'attitude de Martine Aubry a payé. Mais, à bien y réfléchir, est-ce qu'être le "perdant" du congrès de Reims est si grave que ça ? Tout dépendra du rôle et du leadership du prochain premier secrétaire. Si Ségolène Royal l'emporte finalement, elle risque d'avoir une faible assise électorale, ce qui laissera à Bertrand Delanoë de l'espace au sein du PS. Si Martine Aubry l'emporte, Delanoë sera malgré tout un allié nécessaire et il peut espérer des responsabilités importantes, voire, pourquoi pas, déborder Martine Aubry lors du choix du candidat aux présidentielles. Bref, rien n'est perdu. Pour personne d'ailleurs.

Il reste la question que je voulais aborder en écrivant ce long billet en plusieurs temps : que doit être le PS ? Le débat entre "parti de militants" et "parti de supporters" me paraît tout à fait pertinent, encore qu'imprécis. J'ai eu l'expérience, Saba, de ses organisations plutôt à gauche, où l'on se glorifiait d'être des "militants". Le militant, c'est vraiment une figure identitaire forte à gauche. Le militant se lève tôt le dimanche matin pour tracter sur le marché. Il va coller des affiches. Il va aux réunions de section. Grâce à lui, le monde connaîtra des lendemains qui chantent. Le militant est l'héritier d'une longue tradition, parfois familiale. Le grand-père du militant a fait la guerre d'Espagne. Le père du militant a porté des valises en Algérie. La mère du militant a manifesté, toute petite, avec sa grand-mère, pour avoir le droit de vote, puis, plus grande, pour avoir celui d'avorter. Le militant aime bien passer de longs moments avec les autres militants, à parler de ce monde meilleur dont ils rêvent tous et qui, c'est certain, passe par un bras de fer avec ceux qui détiennent le pouvoir, la richesse, les moyens de production. Voilà un peu la gauche d'hier.

Ne crachons pas trop sur elle. Elle a su se donner comme chef quelqu'un qui était manifestement très différent d'elle, François Mitterand. Elle a su, gentiment, laisser des énarques prendre le contrôle du parti socialiste et permettre ainsi au PS d'arriver au pouvoir et aux dits énarques de devenir premiers ministres, ministres ou secrétaires d'Etat. Ils ont un peu "changé la vie", même si ce n'est pas le Pérou.

Mais force est de constater que ces militants ne sont plus tellement en phase avec la société. Ces militants, d'ailleurs, sont probablement peu nombreux au PS même. Mais ce sont les gardiens du temple. Il me semble qu'il est temps de penser à une nouvelle forme d'organisation, sinon de la gauche, au moins du PS.

Un parti de gauche moderne devrait avoir plusieurs rôle :
  • faire remonter les informations. Chaque section devrait pouvoir relayer les difficultés que rencontre les habitants de son quartier, auprès du maire, du conseiller général ou régional mais aussi rue de Solférino, où ces informations, digérées et recadrées, peuvent permettre de comprendre les attentes des électeurs et d'y répondre par des propositions concrètes. Changer le monde, demain, c'est bien mais déjà essayer d'améliorer celui-ci, c'est déjà pas mal et pour cela, le PS gagnerait à éviter de s'appuyer exclusivement sur l'administration et les experts.
  • faire descendre les informations. La section devrait être un lieu de formation et d'information. Lorsque le PS est au gouvernement, la section devrait être le lieu de discussion des mesures proposées ou adoptées. Lorsqu'elle est dans l'opposition, elle devrait être au contraire le lieu où sont analysées et critiquées les mesures du gouvernement. Cela devrait s'accompagner d'une vraie formation, sur le fonctionnement de nos institutions, de notre économie, de notre justice, de notre police... Le PS gagnerait à être un lieu où le citoyen peut s'informer et se former pour comprendre le monde contemporain.
  • tester les idées. Sans doute de nombreuses idées peuvent venir aussi bien des "adhérents de base" que des experts. Mais tester les idées dans les sections ou les fédérations est certainement nécessaire.
  • aller au contact, des associations de gauche sans doute, mais aussi et surtout du reste de la société, pour redonner envie de parler de politique. Cela suppose sans doute de sortir des méthodes traditionnelles comme la séance de tract sur le marché dominical et d'aller vers d'autres formes de communication, essentiellement électroniques d'abord. A quand des réunions tupperware ?
Il me semble que le parti démocrate a construit une bonne partie de sa réussite en dissociant justement les fonctions électorales et les fonctions programmatiques. Le parti ne devrait pas avoir de programme mais simplement servir de base électorale à des hommes qui, eux, ont un programme. Que les soutiers du PS soient là pour faire tourner la baraque, pour organiser les débats, récolter les cotisations et nettoyer les salles à la fin, et que les sympathisants eux, aient la possibilité de choisir, de s'exprimer et de faire, en définitive, par le choix de leurs candidats, le choix de la société vers laquelle ils désirent aller.

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